La libellule, le plus grand insecte de tous les temps

Ce sont les plus grands de nos insectes dont les couleurs éclatantes en font de véritables joyaux. Totalement inoffensifs pour l’homme, ils sont très précieux tant ils s’attaquent aux mouches et moustiques.

L’histoire des libellules remonte bien plus loin que celles des mammifères et des oiseaux. Les odonates ont ancêtres les paléodictyoptères, qui vivaient, il y a 250 millions d’années, au Carbonifère. Cet insecte géant atteignait 60 à 75 cm d’envergure, mais dans les couches du Permien de l’Amérique du Nord, après le Carbonifère, les fossiles ont révélé des libellules de 75 cm. Puis, à l’époque du Jurassique, l’apogée des dinosaures, la libellule prendra l’envergure des odonates d’aujourd’hui, entre 6 et 20 cm. Par conséquent, elle s’impose comme le plus grand insecte de tous les temps.

Aquatique et terrestre

De tout le règne animal, c’est la libellule qui possède les couleurs les plus brillantes. On compte presque cinq mille espèces de libellules dans ‘univers, dont la particularité est d’être aquatique durant le stade larvaire, et terrestre à l’âge adulte. On les rencontre dans les endroits humides, à proximité des lacs et eaux stagnantes, où elles déposent leurs œufs. L’ordre des odonates est divisé en trois sous-ordres. Les anisozygoptères se rencontres au Japon et dans l’Himalaya. Mais c’est en Europe que l’on trouve à la fois les zygoptères et les anisoptères.

Demoiselles et libellules

Les zygoptères, ou demoiselles, ont un corps grêle et délicat, des yeux bien séparés et les quatre ailes semblables, qu’elles maintiennent au-dessus du corps pendant le repos. Ces insectes fluets sont sédentaires et préfèrent planer silencieusement d’une tige à l’autre, capturant la majeure partie des proies dans la végétation.

Les anisoptères, qui comprennent les grandes libellules, sont des insectes massifs, dont les ailes postérieures sont plus larges que les antérieures. Ces voiliers exceptionnels et très rapides, – les anisoptères atteignent la vitesse de quatre mètres à la seconde – peuvent rester suspendus dans l’air comme de vrais hélicoptères miniatures : Leur vol est puissant, leur parcours immense.

L’équipement complet pour le vol

Les odonates sont parfaitement équipés pour le vol. Ils possèdent des ailes robustes. Celles-ci sont traversées par plusieurs nervures longitudinales, et forment un réseau avec les nombreuses nervures transversales. La libellule supporte d’importantes pressions longitudinales sans fléchir. À l’avant de l’aile, tout près de la pointe, une cellule appelée « ptérostigma » évite que la pointe ne se déchire.

L’abdomen, dormé par dix segments, se meut dans tous les sens et fait fonction de gouvernail. La tête, également très mobile, détecte tout mouvement grâce à des organes sensitifs appelés « sensilles », qui transmettent au cerveau les informations. Enfin, la mobilité de la tête permet à la libellule une vue quasi totale de tout ce qui l’entoure. Elle voit le monde en mosaïque.

Trente mille yeux

Les libellules ont des yeux extraordinaires, qui occupent une très grosse partie de la tête. Leurs yeux composés comprennent 10 000 ou 30 000 ommatidies, ou facettes, c’est-à-dire des yeux simples, disposés en nid d’abeille. Les facettes supérieures servent à la vision lointaine, les inférieures à la vision proche. Ainsi la libellule reconnaît ses congénères jusqu’à une distance de 30 à 40 mètres.
Pour apprécier la clarté et l’obscurité, elle dispose de trois petits ocelles, organes oculaires simples, situés sur le sommet de la tête. Et pour atterrit, se poser, cet insecte possède sur chacune des trois parties du thorax une paire de fortes pattes à griffes. L’ancrage sur les supports est réussi.

Comme des hélicoptères

L’appareil de vol des libellules a toujours intrigué les scientifiques et le vol silencieux de cet insecte, excepté un léger cliquetis, est absolument extraordinaire. Les odonates sont si habiles qu’ils peuvent changer brusquement de direction, voler sur place, à la verticale, se déplacer vers l’arrière. Ce sont les yeux qui guident les manœuvres.

Les libellules peuvent se laisser porter en voguant sans battre des ailes. Habiles, elles effectuent des lignes aériennes très compliquées. C’est que les deux paires d’ailes se meuvent indépendamment l’une de l’autre. De plus, elles possèdent de nombreux muscles de positionnement et tendeurs sur le thorax : sur les plaques dorsales, les muscles releveurs à la base des ailes, les muscles abaisseurs.

La chasse en vol

Les pattes, parfaitement greffées sur le thorax, ne permettent pas à la libellule de s’agripper ou de marcher. Elles ont évolué jusqu’à se transformer en appendices utiles et efficaces, formant une sorte de corbeille, qui permet d’attraper les proies en plein vol et de les emprisonner avant de les porter à la bouche pour les dévorer.

La libellule a une importante activité prédatrice. Elle se nourrit d’une quantité d’insectes. Mouches et moustiques sont exterminés par milliers. Les abeilles sont également prisées. Seuls les gros papillons sont délaissés. La chasse en vol a lieu sur l’eau, plus rarement dans les prairies, les clairières, à l’orée des bois.

Elle est intense sur les lieux d’accouplement et de ponte, car les besoins énergétiques des insectes sont très importants. alors les libellules se révèlent cannibales. La demoiselle, qui attrape souvent des insectes au repos, et surveille la végétation alentour, est capable de dévorer en une heure une proie aussi grosse qu’elle, pattes et ailes comprises.

Une place au soleil

Les libellules s’activent le jour car ce sont de grandes amies du soleil. Lorsque le temps est frais, elles exploitent les rayons solaires pour se réchauffer en battant des ailes avant de s’envoler. Elles se posent sur les feuilles ou sur les pierres chauffées par les rayons du soleil.

On voit les aeschnes se diriger vers les troncs d’arbres proches des eaux, et frotter leur corps à l’écorce réchauffée par le soleil. Les libellules ne dédaignent ni nos habits ni nos livres et journaux pourvu qu’ils aient bénéficié de la caresse du soleil.

Mais les libellules chassent aussi au crépuscule comme l’aeschne verte, l’anax napolitain, l’aeschne paisible, qui choisissent l’approche du soir pour chasser moustiques et autres insectes volants. On peut les repérer non loin des canaux, notamment les Aeschnidés, les plus grandes libellules d’Europe, que l’on reconnaît à leur corps allongé, coloré de bleu, marron, vert ou jaune sur fond foncé comme l’aeschna azurée, l’anax empereur.

L’amour en cœur

L’accouplement de ces insectes est spectaculaire : les deux amants s’exhibent en une sorte de contorsion nuptiale. Au bord des lacs, on voit des libellules accouplées, telle l’aeschne printanière, formant un motif en forme de cœur. Ce « cœur copulatoire » est unique dans la classe des insectes. Le mâle, devant la femelle, la tient fermement derrière la tête. Il utilise alors sa pince située à l’extrémité de son corps. La femelle recourbe l’abdomen vers l’avant et unit ses organes reproducteurs à ceux du mâle. Rien ne peut les séparer. Car même s’ils sont importunés par une visite étrangère, ils prennent leur envol en restant unis.

Certes le couple uni peut aussi rester tranquillement dans la végétation. Selon les espèces, l’accouplement dure entre une demi-minute et plusieurs heures. Les mâles éliminent ou neutralisent les spermatozoïdes d’éventuels prédécesseurs avant de transmettre les leurs. Une fois l’accouplement terminé, le mâle abandonne la femelle.

Une fois seule, cette dernière s’exhibe dans une danse verticale sous l’eau. C’est là qu’elle dépose ses œufs, sur les feuilles des plantes aquatiques. La ponte des œufs, qui se fait de deux façons différentes – endophytique ou exophytique -, se fait parfois sous la surveillance du mâle. Il demeure tout près de la femelle et chasse les rivaux, afin que seuls ses œufs soient fécondés et parviennent jusqu’à l’éclosion.

Les larves à l’affût

Les œufs donnent naissance à des prolarves, qui ont la capacité de sauter. Le corps des larves proprement dites correspond à celui des libellules adultes. Leurs yeux sont plus petits, leur abdomen est plus cort, les ailes n’apparaissent que plus tard. Elles sont cpables de se projeter sur une proie.

Les larves de zygoptères et des aeschnides se tiennent surtout dans la végétation. Chez les autres espèces, elles sont enfouies au fond des eaux et guettent les proies. La larve de la grande aeschne, qui chasse toujours à l’affût, dissimulée dans la végétation aquatique ou dans la vase, est capable de se saisir d’un jeune poisson. Sous sa tête, la larve possède une sorte de pince, appelée « masque ».

Lorsqu’un petit poisson, un têtard ou un autre insecte aquatique passe à sa portée, elle déplie brusquement ce masque pour saisir l’animal et le dévorer.

De la nymphe à l’adulte

La transformation laisse deviner l’apparition des premières paires d’ailes rudimentaires, signes de la prochaine mue de la larve en nymphe. Quand vient l’heure de la métamorphose finale, la nymphe qui se trouve dans l’eau, s’attaque à un support comme la tige d’une plante de la rive.

C’est alors que sa peau, qui constitue l’enveloppe corporelle, se fend, se lacère, en expulsant d’abord la tête et le thorax, puis les ailes, l’abdomen et les pattes. Deux heures plus tard, l’insecte est capable de voler dans les airs traçant des arabesques étonnantes et parant l’air de mille couleurs et reflets.

Mais attention, la grande chasseresse qu’est la libellule a aussi des ennemis : elle est la proie des oiseaux notamment les moineaux et dans l’eau, elle fait le régal des grenouilles.

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